Essay Marie Le Lievre. Catalogue 2012. Andrew P Wood (en francais)

2020

Les peintures de l’artiste Néo Zélandaise, Marie Le Lièvre grouillent de saignements et de couches agités de teintes translucides et opaques sur des supports mats. Le Lièvre est une coloriste instinctive, empathique. Sous de sombres couches, d’une couleur riche et subtile, émergent de petits arcs en ciel d’une couleur pure qui scintillent comme des flammes à la périphérie.

La dimension des peintures s’étend de domestique et intime à héroïque. Pour ces dernières, l'effet est océanique et sublime dans le sens Romantique - le spectateur pénètre dans la peinture. L'œil est attiré par toutes les petites complexités et les puncta d'intérêt: des motifs complexes de texture ondulant, les îles émergeant d'opacité, et le changement de couleurs ambigu rappelant l’œuvre de Rothko. Il y a peut-être une relation plus étroite avec l'abstraction lyrique du Tachisme européen plutôt que le verve de l'Expressionnisme Abstrait américain.

Un sens de composition soigneusement élaboré ancre fermement cette expérimentation. La base de chaque peinture incorpore une masse centrale, organique-biomorphique et autonome, une sorte de mandala présentant souvent une galaxie d'interaction complexe et allusive entre la couleur et la texture de l’œuvre. La couleur est de plus en plus déclarative de sa propre position comme un dispositif de composition, qui souligne le travail dédié de l’artiste de travailler et retravailler pour transformer la surface pulpeuse peinte en quelque chose, certes plat, mais tendant vers le sculptural chargé d’intensité.

Lorsque Le Lièvre choisit de travailler le fond de ses peintures, la danse Shiva de la figure et la surface plane est presque palpable dans une glorieuse richesse pour notre rétine.

La peinture est versée en couches successives,et travaillée à la main. L'effet recherché est celui que Baldassare Castiglione dans son Il Cortegiano (1528) appelle Sprezzatura: d'une certaine nonchalance, qui cache l'artifice, et qui montre ce qu'on fait comme s'il était venu sans peine et presque sans y penser - même si l’artiste veut clairement afficher cette ironie défensive en tant que mécanisme de distanciation d'un narrateur invraisemblable.

Il y a suffisamment de signaux pour suggérer l'immense effort derrière l’aléa suggéré. Cela signifie que le travail a de nombreuses connotations, de tension entre la réalité et l'abstraction, de chaos et de contrôle, et en fin de compte il reste imperméable à nos efforts d’analyse.

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